Théâtre – La Réunification des deux Corées.

Un spectacle de Joël Pommerat

Création aux Ateliers Berthier de l’Odéon-Théâtre de l’Europe en janvier 2013.

Joël Pommerat, 55 ans, fait partie des auteurs dramatiques qui comptent dans le paysage du théâtre français contemporain. Il est à la fois auteur, animateur de troupe (Compagnie Louis Brouillard, depuis 1990), et metteur en scène. Il a été récompensé par plusieurs Molière pour une oeuvre variée, centrée à la fois sur un regard pertinent sur la société contemporaine (Les Marchands, 2006, Ma Chambre froide, 2010, et sur la reprise de contes populaires (Cendrillon, 2006, Le Petit Chaperon Rouge, 2008, Pinocchio, 2008). Et chaque fois, un style très original marqué par la poésie (réalisme poétique), l’humour, et un parti pris d’esthétisme tenant en particulier à la lumière. En 2016, il a présenté au TNP, dans une approche différente, mais avec le même succès, Cà ira ? Fin de Louis. Sa méthode de travail est particulière: l’élaboration du spectacle associe en même temps et à la fois scénographie et écriture, à partir d’un projet thématique, avec un collectif d’acteurs qui lui sont attachés, et avec l’aide d’improvisations précédant la réalisation finale sous forme d’un texte définitif.

Le titre de la pièce actuellement présentée au TNP, La Réunification des deux Corées, n’a rien à voir avec un thème géopolitique. Le thème est celui de l’amour dont la société contemporaine nous montre la difficulté qu’il y a à réunir sans heurt, sans dérives et tromperies, sans usure, les deux parties…à l’image des deux Corées… Le dispositif scénique, pour bien marquer la problématique, installe face à face les deux moitiés du public séparé par un grand couloir vide où avec beaucoup de rythme vont se succéder une vingtaine de saynètes courtes, qui glissent les unes après les autres, comme au cinéma à l’aide d’un fondu-enchainé, sans rupture, et avec un ensemble de neuf comédiens tous aussi talentueux, qui semblent avoir été soustraits à la vie quotidienne, dont les fragments nous sont ainsi restitués sans caricature.

La réussite tient bien sûr en grande partie aux situations que (re)présentent ces tranches de vie: divorce ici « parce qu’il n’y a pas d’amour » (mais comment le savoir si l’on ne sait pas ce que c’est que l’amour ?), et là, « parce qu’il n’y a pas que l’amour »… Chaque saynète évolue selon sa propre dramaturgie, de la banalité à la crise, puis à la chute… La plus marquante est celle de ce couple où la femme qui a perdu toute mémoire est entrainée par son mari dans une course folle pour conjurer par le mouvement, le drame de la répétition inutile de propos maintes fois répétées. Choses vues et entendues, dont la restitution est bien du domaine de l’art, à la fois par la construction dramatique et le jeu des acteurs.

Malgré le pessimisme d’un regard malheureusement réaliste, l’humour, la poésie et la tendresse que l’on peut ressentir pour les personnages, amènent un peu de légèreté…

Ce spectacle, dont la création remonte à quelques années à L’Odéon (Ateliers Berthier), mérite bien les nombreux prix qu’il a reçus. Il est encore à Villeurbanne jusqu’au 1er février 2019.

Hugues Rousset.

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Durée du Spectacle: 1 h 50.

9 représentations à venir jusqu’au 1er février 2019. Calendrier complet avec dates et heures sur le site du TNP à Villeurbanne

www.tnp-villeurbanne.com

04 78 03 30 00

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