Chroniques Cinéma – « Les terrasses »

de Merzah Allouache

avec Adila bendimerad, Nassima Belmihoud

Film franco-algérien. Drame (1h32).

Un film qui ne masque pas la violence qui gangrène la vie algéroise, conséquence des années de terrorisme, mais qui montre aussi le courage des habitants d’Alger la Blanche et qui vaut qu’on les entende

Chroniques Cinéma de Marie-Noëlle Gougeon

L’affiche est trompeuse. Avec ce ciel bleu et ses toits au soleil, on pourrait penser à  une radieuse après-midi d’été. Merzah Allouache, cinéaste algérien et qui vit en France nous offre pourtant un film plutôt sombre, tourné sur des terrasses de cinq quartiers bien connus de la capitale algérienne dont ceux de Bab-el-Oued, Notre Dame d’Afrique, Belcourt, la Casbah. Au pied des immeubles, la sublime baie d’Alger et sa mer paisible mais là -haut c’est la pauvreté qui règne : des murs défraîchis, des paraboles de TV rouillées, des portes en bois usées. Sur ces terrasses, cinq histoires vont s’écrire et se dénouer tout au long de la journée scandée par les appels à  la prière.

Sous ce ciel lumineux, et malgré les améliorations de la vie des habitants, le réalisateur nous montre un pays encore traumatisé par ces dix années de guerre civile : folie dues aux exactions des terroristes, misères matérielle et morale, violence des uns (les plus fortunés ou les plus forts) sur les autres ( les vieillards, les femmes). Malgré l’appel à  la prière toujours aussi évocatif, la religion est davantage présentée comme un moyen d’enrôlement vers le djihad ou le trafic de drogues.

Seuls deux groupes de jeunes semblent espérer un ailleurs meilleur : des musiciens et une jeune équipe de TV. On sent qu’une autre Algérie est en train de naître avec des manières de s’exprimer qui lui est propre et pourtant .la jeune chanteuse assistera impuissante au suicide d’une jeune femme et l’équipe de TV tombera sous les coups d’un maître-chanteur.

Il y a beaucoup de désillusions dans ce film tourné en très peu de jours et s’inscrivant quasiment dans une démarche documentaire. « On voulait changer le pays mais c’est lui qui nous a changé » dit un des protagonistes, ancien commissaire de police et ancien communiste. On reste sur ces terrasses battues par le vent, regardant la rue en bas grouillante de monde et la mer au loin, promesse de tous les départs.

Et pourtant malgré toutes ces violences montrées, cette sourde hostilité « Pourquoi on ne s’aime pas ? » chante douloureusement Assia la jeune chanteuse, on est sensiblement attiré et subjugué par toutes ces plaintes et ces trajectoires de vies aussi terribles soient-elles. Elles ont été abîmées par une folie meurtrière, politique, religieuse. Mais elles sont aussi porteuses d’autre chose. Aujourd’hui la jeunesse avec la fougue et la vitalité qui lui sont propres n’aspire qu’à  vivre des jours meilleurs et l’espère. Il lui faut se relever et se battre. Un concert de musique traditionnelle clôt le film. Manière de se donner du courage ou de fuir dans le passé ? Il faut monter sur cesTerrasses,ne serait ce que pour donner existence et réalité au courage de ses habitants.

[->http://www.allocine.fr/film/fichefilm_gen_cfilm=222984.html]

« Histoire de Judas » suite

Le film «Histoire de Judas », de Rabah Ameur-Zaïmeche, sorti à  la mi-avril, ne sera peut-être plus projeté à  Lyon lorsque cet éditorial paraîtra. Ce n’est pas un film grand-public, sa diffusion est restée discrète, et les spectateurs ne se bousculaient pas dans les quelques salles où il était projeté. Les chrétiens se sont sans doute montrés plus intéressés que d’autres, en raison de son titre. Ils espéraient peut-être y découvrir la véritable histoire de l’apôtre qui trahit Jésus. Si tel est le cas, ils en furent pour leurs frais, car l’histoire racontée est fort éloignée de la réalité historique. Mais c’est un bon film, peut-être même un grand film.

Il a été tourné dans un village en ruines proche d’Annaba (anciennement Bône), en Algérie, un décor qui ne ressemble aucunement aux collines de Judée : des palmiers souvent trop secs se balancent sous un vent fort et bruyant, l’environnement est beaucoup plus minéral que dans les environs de Jérusalem, aucune construction n’est intégralement debout.

Les personnages principaux sont trois hommes et une femme. Cette dernière, appelée Suzanne dans le film, est celle qui versa un parfum de grand prix sur les pieds de Jésus. Jésus lui-même est un homme de haute taille, attentif à  tous et fascinant ; de lui se dégage une grande autorité naturelle. Judas est avide de s’instruire, il est présenté comme le disciple qui fut le plus proche de Jésus – les autres apôtres ne sont que des ombres -, et il protège jalousement cette proximité.

Le réalisateur a ajouté un troisième personnage au nom soigneusement travaillé, un dénommé Carabas dont le nom, identique à  celui du personnage du Chat botté, fait inévitablement penser à  Barabbas ; c’est une sorte de prophète marginal habillé de guenilles, affligé d’un strabisme divergent prononcé, vivant de rien, vitupérant contre les pouvoirs en place, tant celui des grands-prêtres juifs que celui des romains.

La première scène se passe dans une maison isolée en plein désert ; Judas vient y chercher Jésus qui a passé quarante jours en ermite, pour qu’il commence enfin sa tournée de prédication. La dernière scène ou presque se passe dans le tombeau où Jésus a été inhumé et où son cadavre, au matin de Pâques, n’est plus. Les quelques scènes évangéliques évoquées (principalement entre les Rameaux et Pâques) sont toutes présentées de façon décalée. Un exemple significatif : lors de l’entrée de Jésus à  Jérusalem le dimanche des Rameaux, il porte un ânon dans ses bras au lieu que ce soit un ânon qui le porte. Et tout est à  l’avenant.

Le réalisateur a usé de beaucoup de liberté par rapport à  l’histoire, en s’inspirant en partie d’un écrit apocryphe connu dans une version en langue copte, découvert en Égypte à  la fin des années 1970, sans doute composé vers le milieu du 2ème siècle de notre ère, appelé Évangile de Judas. Sa publication en 2006 a été remarquée dans les milieux scientifiques. Judas y est présenté, non pas comme un traître mais, au contraire, comme le disciple le plus attaché à  Jésus, qui organisa sa mort avec l’accord du maître, car le monde matériel est perçu comme si mauvais qu’il vaut mieux le quitter le plus tôt possible. Cette vision négative du monde matériel a existé dans l’Antiquité, dans des courants minoritaires appelés « gnostiques ». L’amitié privilégiée entre Jésus et Judas est reprise dans le film, mais l’idéologie gnostique de l’Evangile de Judas ne l’est pas. Dans le film, Judas ne joue aucun rôle dans l’arrestation de Jésus ni dans sa mise à  mort. Il est son ami du début à  la fin, loyal jusqu’au bout.

Il faut situer ce film dans un courant artistique très représenté aujourd’hui, notamment dans le domaine littéraire, qui consiste à  écrire des fictions mettant en scène des personnes ayant réellement existé. Ce n’est pas de l’histoire, c’est l’histoire telle qu’elle aurait pu être.

Si l’on voulait corriger le titre du film, on l’appellerait sans doute « Une histoire de Judas » avec un article indéfini : une histoire possible, possible au milieu de beaucoup d’autres, mais qui n’a pas grand rapport avec ce qui se passa effectivement. Cela n’en fait pas un mauvais film, bien au contraire. L’opinion des critiques a été assez divisée au moment de sa sortie. Personnellement, je l’ai trouvé esthétiquement beau, un peu obsédant – notamment en raison des scènes d’intérieur très sombres et de ce vent qui ne s’arrête jamais -, optimiste en raison des liens d’affection et d’amitié qui règnent entre les personnes et qui ont valeur rédemptrice.

Il a reçu le prix du Jury œcuménique au Festival de Berlin, en février 2015. C’est une récompense bien méritée.

Michel Quesnel, prêtre de l’Oratoire

Chroniques cinéma – « Le labyrinthe du silence »

de Giulio Ricciarelli

avec Alexander Fehling

Film dramatique allemand ( 2015 -2h03).

Chroniques cinéma de Marie-Noëlle Gougeon

Une leçon d’histoire, une interrogation sur la banalité du mal et ceux qui le commettent. Mais aussi un thriller classique, efficace et exemplaire.

Le labyrinthe du silence
est inspiré d’une histoire vraie. Dans les années cinquante en Allemagne, le procureur général de Francfort-sur-le-Main, Fritz Bauer va autoriser Johann Radmann, un jeune procureur à  ouvrir une enquête sur d’anciens soldats attachés au camp d’Auschwitz et coupables d’être responsables de milliers de morts de prisonniers. Ce personnage de jeune procureur n’a pas complètement existé mais il a été créé à  partir de trois magistrats qui ont eu la charge de cette enquête.

8000 soldats travaillèrent dans ce camp qui après 1945 se situait en Pologne et donc loin de la réalité des allemands après guerre. Johann Radmann est confronté à  une enquête de titan pour retrouver ces soldats qui sont revenus à  la vie civile. Et c’est à  une course contre le temps, contre le déni de cette période, la volonté de l’oubli qu’il doit se battre. Le film se déroule comme un thriller avec les chausses- trappes, les intimidations, les freins que l’on place sur la route du jeune magistrat. Lui-même découvre avec horreur que son père était inscrit au parti nazi

L’autre grande qualité du réalisateur c’est d’avoir placé le propos de son film sur la question de la normalité, de la banalité. Comment des jeunes gens ont-ils pu commettre de telles atrocités ? Comment aujourd’hui peuvent-ils être redevenus de simples citoyens, boulangers, enseignants, journalistes, sans que la société s’en émeuve.

Beaucoup d’allemands ignoraient avant le procès de ces soldats la réalité d’Auschwitz, ou ne voulaient pas savoir. Les anciens soldats ne veulent pas parler.

Et le film de Giulio Ricciarelli nous restitue bien ce travail de dévoilement, de dessillement opéré par Radmann sur ses compatriotes. Et en écho, nous ressentons cette interrogation : pouvons-nous fermer les yeux, ne devons-nous pas nous aussi être vigilants, ne rien laisser passer des omissions au respect de la dignité humaine, combattre toute forme de barbarie aujourd’hui ?

Le film restitue aussi toute l’ambiance de cette époque, avec un souci des décors, de la musique, des vêtements : banalité des vies et banalité du décor vert-de-gris des villes allemandes des années 50
Giulio Ricciarelli réalise également un beau travail sur la photographie et le montage.
Alexander Fehling, l’acteur allemand qui joue Radmann est excellent.

Le procès aura lieu en 1958, même si peu de soldats furent poursuivis (18 seulement). Il aura permis à  l’Allemagne d’opérer un formidable travail sur elle-même, sortir du déni et de l’oubli des crimes de la seconde guerre mondiale. Certains bourreaux d’Auschwitz ne furent jamais jugés, comme le Dr Mengelé, enfui en Amérique du Sud. Preuve que des protections existaient jusqu’au sommet de l’Etat

Ciné-conférences 2015 – « Lyon au cinéma »

le jeudi 30 Avril à  14h30

l’Institut Lumière

25 rue du Premier-Film BP 8051
69352 – Lyon Cedex 08

Tél. 04 78 78 18 95 Fax 04 78 7818 94

[->contact@institut-lumiere.org]

Jeudi 30 avril à  14h30

Des frères Lumière à  Bertrand Tavernier, Lyon fut très souvent le décor de nombreux films. Cette conférence permet aussi de redécouvrir la ville à  travers des documents d’archives Gaumont et Pathé, des années 1920 aux années 1970. Un témoignage vivant, un immense album de souvenirs mais l’étude de l’évolution de la vision de Lyon de l’Après Guerre à  nos jours

• Suivi à  16h30 du film : Une semaine de vacances de Bertrand Tavernier (1980, 1h42)

Avec Nathalie Baye et Gérard Lanvin. La dépression soudaine d’une enseignante lui permet de ré-apprendre à  apprécier la vie et ses amis Le plus beau film jamais tourné à  Lyon, dont il n’est pas seulement le décor mais aussi l’âme.

Les ciné-conférences

Chaque intervention dure 1h30
Salle de cinéma du Hangar du Premier-Film à  14h30.
Film dans la salle de cinéma du Hangar du Premier-Film à  16h30.
Ouverture des portes à  14h.
Les ciné-conférences ne sont pas accessibles aux groupes scolaires.

TARIFS
5,50 euros (Plein tarif), 4,50 euros (Tarif réduit), 3,50 euros (Abonnés)
Si vous avez assisté à  la conférence, film: 5 euros, 4,50 euros (abonné)
Il est conseillé d’acheter ses places à  l’avance à  l’Institut Lumière ou par téléphone au 04 78 78 18 95

Renseignements
Fabrice Calzettoni
04 78 78 18 91

[->fcalzettoni@institut-lumiere.org]

[->http://www.institut-lumiere.org/cinema/cin%C3%A9-conf%C3%A9rences.html]

Chroniques cinéma – « Une belle fin »

de Uberto Pasolini

avec Eddie Marsan

Comédie dramatique ( Royaume Uni) 2013. 1H32.

Chroniques cinéma de Marie-Noëlle Gougeon

Un film subtil et profond sur l’accompagnement à  leur dernière demeure de ceux qui sont « sans familles ».Une belle réflexion sur le prix de la vie, nos liens aux autres. Et une fin quasi évangélique.

John May, donne tout son temps à  son travail : trouver les familles de ceux qui décèdent seuls, sans parents. Avant de procéder à  la crémation, il fait tout son possible pour retrouver un parent éloigné. Et s’il n’y a personne à  l’enterrement, il y va, seul, écrivant même au pasteur l’éloge funèbre du défunt ! Cette tâche lui convient, lui qui vit seul, sans famille, dans un immeuble pour célibataires. Méticuleux, ordonné jusqu’à  la maniaquerie, introverti. Toutes ces vies qui défilent sous ses yeux remplissent sa solitude.

Oui, mais voilà  cet attachement à  bien faire son travail ne fait pas l’affaire de son chef qui le trouve trop lent. Il prend prétexte d’une restructuration pour lui annoncer son licenciement. John May n’a que quelques jours pour retrouver la famille de son dernier « défunt » Billy Stoke, qui habitait dans le même immeuble que lui. Et c’est dans un vrai jeu de piste que John May va se lancer à  la recherche des amis, de l’amie , de la fille de ce pauvre Billy Stoke, mort seul, après une vie cassée entre petits boulots, vie de clochard et prison..John May ressent un certain attachement pour ce mort qu’il n’a pourtant pas connu.

La fin (que je ne dévoilerais pas) est inattendue mais une très belle trouvaille du scénariste. Elle donne à  l’ensemble de l’histoire toute sa dimension morale et .évangélique.

Car comment mieux illustrer l’amour pour les autres et la communion des saints ?

Voilà  un beau film, subtil, délicat qui parle d’un sujet que l’on préfère ne pas trop voir. Comment sont accompagnés jusqu’à  leur dernière demeure ceux qui n’ont plus de famille ?

John May, ce doux célibataire solitaire, se retrouve un peu dans tous ces êtres dont il s’est occupé et dont il conserve les photos. C’est comme s’ils composaient sa famille. Eddie Marsan, comédien britannique donne à  son personnage une dimension à  la fois lunaire et compassionnelle.

La première partie du film se déroule méthodiquement au rythme des activités répétitives de John May, dans une ville de Londres un peu grise. Le décor de son appartement est minimaliste, son intérieur sans poussière est si bien ordonné.

Puis peu à  peu, John May part à  la rencontre des amis et de la vie brinquebalante de Billy Stoke : son emploi du temps est moins strict, le paysage prend de la couleur, John May risque même un sourire et un sentiment affectueux vis-à -vis de la fille de Billy Stoke. A leur contact, sa vie monotone, réduite à  ce bureau de fonctionnaire va s’humaniser. John enlève sa cravate, enfile un joli pull bleu..

Oui, il côtoie la mort tous les jours, mais cet univers des funérailles, ce qu’il a semé, vont lui apporter contre toute attente la plus jolie fin de vie qu’il pouvait imaginer.

Recevoir des autres à  la mesure de ce qu’il avait donné

REGARDS SUR LE MONDE

PEINTURE

Exposition du 15 mai au 1 juin 2015

Laura Julien

Janine Fabron

Marie Seymat

Espace culturel Saint-Polycarpe

25 rue René Leynaud ou rue Burdeau
69001 LYON

Entrée par le passage Mermet,

Ouverture :

jeudi, vendredi, samedi de 15h à  18h

La peinture est un outil dur. Propre à  refendre le réel. À déchirer la matière pour voir clair au-dedans d’elle, à  l’intérieur de ses tensions, dans l’articulation de ses structures. Propre à  briser les miroirs de l’apparence. La peinture est faite pour ouvrir la matière ».

Nicolas de STAà‹L, exprime ici en quelques mots les jeux et les enjeux de la peinture.

Nos trois peintres ne prétendent pas rivaliser avec le maître, mais leur travail témoigne d’un corps à  corps avec ce que le réel offre au regard pour que la couleur, la matière et les formes donnent à  voir quelque chose de nouveau, un autre éclairage, d’autres pistes, une émotion partagée.

L’objet de ces recherches ; c’est le monde qui nous entoure ou qui nous construit par les images qui nous inondent dans une société structurée par les médias. C’est une manière d’être au milieu des autres.

Comment rester en marge des évènements, des drames comme des beautés de la nature et de la vie. L’artiste est un être vivant qui absorbe ce qui l’entoure, juste peut-être pour en reparler à  l’imaginaire de son espace intérieur et au nôtre.

M.S.

[->http://confluences-polycarpe.org/?page_id=76]

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LIGT IS CALLING # 2

Du 9 avril au 9 mai 2015

Exposition d’art contemporain – Installations vidéo et lumière

Espace culturel Saint-Polycarpe,

25 rue René Leynaud ou rue Burdeau, 69001 LYON

Entrée par le passage Mermet

par Transluxphotonpostflash :

Sacha Aïb (sténopé),
Jean-Luc Blanchet, (peinture lumière),
Thierry Chassagnac (vidéo lumière),
François Giovangigli (corps célestes),
Jean-Pierre Olinger (négatoscopies),
Damien Saillard (fluorescences).

Ouverture :

jeudi, vendredi, de 15 h à  20 h

samedi et dimanche de 15h à  18h

[->http://confluences-polycarpe.org/?page_id=76]

Chroniques cinéma – « Taxi Téhéran »

de Jafar Panahi

avec Jafar Panahi. (Comédie dramatique Film Iranien. 1h22).

Ours d’or au Festival de Berlin 2015.

Chroniques cinéma de Marie-Noëlle Gougeon

Interdit de tourner dans son pays pour une durée de 20 ans, l’iranien Jafar Panahi établit le tour de force de réaliser un film dans un taxi : c’est la force du cinéma, de l’imagination contre l’obscurantisme d’une dictature. Du courage, de l’émotion et un immense talent

C’est un film comme on en voit peu : tourné entièrement dans un taxi, conduit par Jafar Panahi lui-même, Taxi Téhéran peint la rencontre, le dialogue du réalisateur avec une quinzaine de « clients »transportés dans son véhicule à  travers les rues de Téhéran. Trois petites caméras installées dans l’habitacle filment en permanence et permettent des angles de prises de vues différents.

On ne sait jamais si ce sont des acteurs ou si les personnages embarqués sont de vrais clients. Mais c’est la force de Jafar Panahi, de montrer à  travers une fiction, la réalité de l’Iran : les empêchements à  la liberté, l’interdiction d’exercer son métier, les pressions subies par la population.

Sa galerie de portraits est tout sauf misérabiliste et désincarnée : c’est le petit trafiquant de DVD prêt à  l’embobiner, ce sont deux vieilles femmes superstitieuses et désopilantes avec leur poisson rouge et qui le houspille, c’est sa petite nièce qui n’arrête pas de le filmer pour réaliser dit-elle, un film « diffusable » ! Plus loin, il prend en charge un ami qui s’est fait tabassé et qui connaît son agresseur, une amie avocate interdite de plaider et emprisonnée elle aussi. Il s’agit de Nasfin Sotoudeh, avocate et militante des droits de l’homme en Iran. Et le sourire de cette femme surveillée, est désarmant de gentillesse. Lui-même ne se sent pas en sécurité. Il croit souvent entendre la voix de celui qui l’a arrêté.

On sent physiquement l’angoisse et la peur encercler le taxi. L’emprisonnement s’insinue dans toutes les têtes, même en dehors du pénitencier. Cet homme qui monte dans le taxi, le visage ensanglanté a-t-il eu réellement un accident? La dernière séquence nous laisse médusés. Est-ce la réalité du pays qui envahit la fiction du film ? Ou bien cette réalité là  était la raison même du film ?

Ou est la vérité dans ce pays où l’Etat demande de filmer le côté radieux, positif de la société (?) sous peine de ne rien pouvoir tourner, ni diffuser..

Mais on aura beau arrêter, emprisonner, assassiner, le courage, la liberté d’expression, (un mot qui prend tout son sens ici), le talent des cinéastes et la force des images trouveront toujours des chemins pour se faufiler et rencontrer le public. Il y aura toujours un téléphone portable, une petite caméra, une caméra vidéo pour capter la réalité que les dictateurs veulent masquer.

Jafar Panahi aime le cinéma plus que tout : C’est en toi dit-il à  un jeune cinéaste en herbe de trouver ton sujet. Pour lui, c’est une question de vie, de survie.

Et pour nous l’occasion d’assister à  une grande et belle leçon de cinéma.

Taxi Téhéran a obtenu l’Ours d’Or au Festival de cinéma de Berlin en février 2015.

[->http://www.allocine.fr/video/player_gen_cmedia=19551971&cfilm=234644.html]

Ciné rencontre – « M ET LE 3ème SECRET »

SAMEDI 18 AVRIL À 20H00 au Ciné Mourguet

(15 rue Deshay – Ste Foy-lès-Lyon – face à  la Mairie)

Débat avec le producteur NICOLAS REOUTSKY

un film de Pierre Barnerias

avec les voix d’André Dussollier et Héléne Ségara.

Et si le Vatican n’avait pas tout dit sur les révélations de la Vierge à  Fatima

Depuis 2000 ans, Marie, femme juive priée par des musulmans, Mère de Dieu pour les Chrétiens, déesse pour les Hindous, fascine.

[->http://bit.ly/1MUTmk5]

Plus de renseignements [->www.cinemourguet.com ] ou 04 78 59 01 4