Qui a envie d’être aimé ?

d’Anne Giafferi

France, 1h28, 2010.

Sortie en France le 9 février 2011.

avec Eric Caravaca, Arly Jover, Valérie Bonneton, Jean-Luc Bideau, Benjamin Biolay.

Touché par la grâce ? Quoi de plus provocant aujourd’hui dans nos sociétés occidentales! Un film savoureux et plein d’humour sur une conversion religieuse et forcément étonnante.

Les questions religieuses étant sources de grands débats dans les médias, de violences physiques dans certaines parties du monde et de malaise pour l’occident laïc, on oublie souvent que la foi peut être une grâce et la pratique religieuse un acte tout à  fait ordinaire.

Ordinaire, c’est ainsi qu’on peut qualifier la vie d’Antoine, personnage principal de Qui a envie d’être aimé ? Un père de famille tranquille, ayant un métier lui permettant de bien vivre dans une grande ville française, une femme, deux enfants, la banalité d’une vie contemporaine. Un jour, par politesse, il répond à  une invitation et assiste, à  reculons, à  un groupe de catéchèse.aime2.jpg

Il est amusant de constater combien cette conversion est provocante pour l’entourage. En France, on a appris à  respecter les « autres croyants », juifs et musulmans mais on se moque toujours volontiers des « cathos ». Personnages ringards au possible dont l’image oscille entre un passéisme imbécile sur les questions de sexualité et une admiration sans faille pour l’engagement, version abbé Pierre, mère Teresa ou plus récemment, moines de Tibhérine Avec humour et légèreté, Qui a envie d’être aimé ? redonne de l’ordinaire, et donc du sens, à  une foi qui s’exprime de façon si diverse, selon les époques ou les lieux.

De façon très subtile, le film s’appuie aussi sur la complexité des relations père/fils. Antoine vit une relation complexe avec Dieu mais aussi, et bien avant qu’il rencontre le Père, avec son père et avec son fils. Qui a envie d’être aimé ? propose une version très actuelle de la parabole du fils prodigue. Ce passage de l’Evangile taraude toujours autant nos contemporains et inspirent de nombreux artistes, qu’ils soient cinéastes ou écrivains. Le vrai scandale étant ce père qui accueille son fils, parce qu’il sait qu’il vaut mieux que ses actes, avec un amour infini. Le vrai scandale étant aussi qu’on se sente toujours à  la place de celui qui est resté et qui ne se sent pas assez fêté et remerciéaime3.jpg

Pour la réalisatrice, Anne Giafferi, il était important de montrer aussi nos maladresses. Maladresses de parents vis-à -vis de leurs enfants, maladresses dans nos relations à  l’autre, à  une époque où il faut être fort et performant. Antoine fait une rencontre avec Dieu lorsqu’il accepte ses failles, ses doutes, sa vulnérabilité. Lorsque qu’il passe de la lecture quotidienne du code pénal – que sa profession d’avocat nécessite – à  celle de la bible. Il passe de la loi des hommes, une justice longuement réfléchie, débattue, expliquée, à  une loi divine, qui proclame un besoin et une nécessité d’amour, fondée sur des notions contestables de croyance, de miracles et de révélations…

Toujours avec finesse, le film n’essaye pas de convaincre ou de justifier. On se moque autant du public catho traditionnel que de la stupéfaction de l’entourage. « Tu aurais pu au moins aller chez le Daï Lama » lance la sœur d’Antoine, pour qui seul l’exotisme ou la mode peuvent être une excuse à  la religion. Elle préfère la psychanalyse pour comprendre sa vie, un autre personnage suit des cours de philo. Ce qui intéresse Anne Giafferi, et qui touche les spectateurs, ce n’est pas de débattre de l’existence de Dieu mais de parler du rapport intime et si complexe des individus par rapport à  la foi, ou à  l’absence de foi. Comme dans la vraie vie, la grâce reste à  tout jamais un mystère. Mystère que le personnage ressent et dont il se dit imprégné mais qu’il est impossible d’expliquer, ni de provoquer.aime1.jpg

Qui a envie d’être aimé ? est autant une histoire de famille, de conversion, qu’une histoire de quête impalpable où chacun cherche à  être aimé et à  aimer. Inspiré du roman Catholique anonyme de Thierry Bizot, le film excelle dans le choix de ses interprètes, avec Eric Caravaca dans le rôle principal, calme, énigmatique et vulnérable, et Benjamin Biolay en fils prodigue, un régal !

Magali Van Reeth

Signis

Interview de Thierry Bizot aux Bernardins

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Blog de Thierry Bizot :[->http://bizot.blog.croire.com/]

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