Habemus papam

de Nanni Moretti

Festival de Cannes 2011, sélection officielle.

Italie, 1h42, 2011.

Sortie en France le 7 septembre 2011.

avec Michel Piccoli, Jerzy Stuhr, Nanni Moretti.

De beaux costumes, un rituel spectaculaire, des bâtiments grandioses, un réalisateur qui sait jouer de l’émotion et de l’humour, et l’élection d’un nouveau pape devient un joli moment de fiction et de cinéma.

Réunis en conclave pour élire le pape, les cardinaux du monde entier sont coupés de l’extérieur pendant quelques jours. Le nouvel élu, écrasé par cette charge qu’il n’avait jamais envisagée, traverse une longue période de doute et demande un peu de répit avant d’affronter les obligations de cette élection. Cela n’étant pas prévu par les usages très codifiés du Vatican, commence une période d’attente, d’incertitude et d’imprévus qui vont apporter une note de fantaisie dans ce groupe très sérieux.
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Un conclave est un huis-clos fascinant pour un metteur en scène, on l’a vu au moment de l’élection de Benoît 16, lorsque les médias internationaux, même ceux des pays les plus laïques, ont campé pendant plusieurs jours place Saint-Pierre à  Rome. D’autant plus que tous les protagonistes portent de magnifiques costumes rouges, ornés de dentelle blanche et de dorures. Pourtant, pour le réalisateur italien, Nanni Moretti, le propos dépasse celui de l’élection d’un pape : « J’ai raconté à  ma manière un monde bien précis, qui est celui du Vatican. Mais je pense que les thèmes du film et l’angoisse du personnage principal peuvent concerner également d’autres réalités, d’autres mondes, et toucher des spectateurs très éloignés des personnages que je mets en scène. »

Si Habemus papam adopte le ton de la comédie, la détresse de cet homme, face à  cette charge, est poignante. Il est sincèrement perdu et s’il ne remet pas en cause sa foi, il doute de ses capacités physiques à  endosser ce rôle. En jouant sur le double sens de ce mot, « rôle », Nanni Moretti fait une mise en abîme avec une troupe de comédiens répétant Tchekov. Un des acteurs principaux, passionnément dans son rôle, frise la folie. Les répliques disent la difficulté de vivre, de faire des choix. Les psychanalystes aussi sont à  la fête, toujours prompts à  dénoncer les manques de leurs patients mais incapables d’agir dans leur vie personnelle.

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Michel Piccoli interprète avec brio, et une touchante humanité, le personnage principal, le cardinal Melville. Nom très bien choisi qui fait le lien avec le romancier américain, auteur du célèbre Moby Dick, dont tous les romans sont hantés par l’échec et une immensité à  conquérir.

Comédie sur le doute et l’épuisement d’un vieil homme dans des circonstances très particulières, Habemus papam se moque gentiment des rites en usage au Vatican, mais c’est sans vulgarité ni méchanceté. C’est du beau cinéma et le spectateur en sort plutôt réjoui !

Magali Van Reeth

Signis

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