Cinéma – Gueule d’ange

Un film de Vanessa Filho

France – 2018 – 1 h 48

Une affiche. On ne saurait rien d’autre que le titre et ces deux visages couleur or. Laquelle des deux, une gueule d’ange ? Laquelle sauvera l’autre ? Il est question de sauveur dans ce film, où une enfant a grandi trop tôt. Ce sera elle, huit ans, qui l’embrasse sous la glabelle, cette maman qui n’a pas grandi. Huit ans, et déjà responsable. Elle voit sa mère boire, alors elle donne de l’alcool à ses peluches puisqu’il paraît que ça donne à voir la vie en rose. Elle voit le désespoir de sa mère, elle la voit allongée, les volets fermés, alors qu’en plein jour elle devrait être debout, cette femme au visage éclatant.

Ayline Aksoy-Etaix (Elli) et Marion Cotillard (Marlène)

La parole n’est pas fluide, la parole est fatiguée, la parole est absente, déjà sortie de ce corps maquillé, habillé de strass. Déjà absente à elle-même, avant même qu’elle ne disparaisse pour de vrai. Comme dans « Cow-boys Angels », cette petite fille rencontre le père qu’elle n’aura jamais, lui-même ayant manqué du sien. Deux égarés, deux solitudes qui se reconnaissent. Il prend les gifles qu’elle ne pourra jamais mettre à sa mère pour la réveiller, trop fragile. Et elle lui dessine un nouveau coeur qui lui permettra de plonger à nouveau. La chute est vertigineuse. Ce ne sont pas les enfants qui devraient sauter dans le vide, ce n’est pas aux enfants de mettre le réveil, de stimuler les grands qui ont un trop-plein de chagrin. Que mettra-t-elle en place pour sauver celle qui ne devrait pas savoir ?

C’est un film sur les enfants dont on n’a pas pu prendre soin, sur la dépendance qu’il faudrait regarder droit dans les yeux, sur l’alcool et ses ravages – « Ravages: effets désastreux de quelque chose sur quelqu’un » – Comme dans « Jusqu’à la garde », « La Route Sauvage », « La Vita possibile »…

Des enfants qui auront un manque pour toujours. Des enfants grandis trop tôt. Des voleurs d’enfance. On appelle ça, « parentification ». On appelle ça drame, ce qu’on laisse pour la vie future. L’autre à sauver, le vide à combler. La culpabilité de n’avoir pu soigner cette grande personne qui aurait probablement mieux fait de ne pas avoir d’enfant.

Cindy Mollaret

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