Après le discours aux Bernardins

Le Service arts, cultures et foi et le réseau incroyance-foi proposaient le 13 décembre dernier à  l’Université catholique de Lyon une matinée avec projection du discours de Benoît XVI et temps de travail, texte en main, pour permettre à  chacun une appropriation du contenu. Jean-François Chiron, doyen de la faculté de théologie en rappelait les articulations essentielles.

Benoît XVI a bien conscience que pour les croyants ce qui constitue l’être humain, c’est sa relation à  Dieu. De même que l’être humain est tout entier être de langage, il est tout entier être de relation à  Dieu. Vouloir le définir sans cette relation, c’est l’amputer. Aujourd’hui l’être humain en société ne se définit plus comme en relation à  Dieu. Dans sa déclaration Dignitatis humanae au concile Vatican II, l’Eglise a accepté de sortir d’un idéal de chrétienté. Ce qu’elle a admis pour l’homme en société, peut-elle l’admettre pour une définition de l’homme en tant que tel ?

A première lecture on peut comprendre que la seule culture humaine, humanisante est la culture chrétienne, puisqu’il est dit que toute culture doit chercher Dieu, être ouverte à  une transcendance. Quaerere Deum, cette expression qui revient 21 fois dans le discours peut être comprise à  deux niveaux. Celui qui constitue aujourd’hui le travail de tout théologien catholique, comme hier celui des moines : chercher Dieu et se laisser chercher par lui dans l’Ecriture, dans la Parole, dans une communauté de foi. Et l’autre niveau qui peut être la caractéristique d’une société qui maintient l’ouverture à  une transcendance, au moins comme possibilité, sans la disqualifier à  priori.

Les questions n’ont pas manqué, en particulier sur « la dernière phrase du discours qui semble condamner comme vaine toute culture profane et tout dialogue avec une culture athée soucieuse de développer l’humain et les valeurs spirituelles ». Mais que faut-il entendre par « culture athée » ? Le refus de toute ouverture au transcendant, le pape le récuse, mais dans une culture soucieuse de l’humain et du spirituel, le dialogue devient possible. Dans ce monde multiculturel, faisait remarquer un témoin, ne faut-il pas reconnaître que sous nos yeux se vivent différentes formes d’alliances entre Dieu et les hommes. Un discours courageux et décevant pouvait-on entendre à  partir des diverses réactions : courageux car il était important de rappeler que l’homme ne peut être vraiment humain si son cœur n’est orienté vers la recherche de Dieu et les réalités ultimes, recherche de l’autre et du Tout Autre : décevant car il manquait une ouverture à  toutes ces personnes qui sont à  la recherche d’une dimension spirituelle, sans être de culture chrétienne.

La conclusion nous a ouverts aux différentes façons de faire de la théologie. Pendant les 11°/12° siècles (la transition étant le 12° siècle comme pour le passage du roman au gothique) le lieu où l’on fait de la théologie, c’est le monastère par la lectio, meditatio, contemplatio, à  partir du 12° siècle le lieu change c’est l’Université et la lectio est faite pour l’enseignement. C’est tout le passage d’une théologie biblique, méditative, qui se fait prière, à  une théologie argumentative, dialectique, comme l’essai de synthèse que fut la Somme théologique de Thomas d’Aquin. Visiblement Benoît XVI se situe dans une lignée plus monastique.

Compte rendu Gilbert Brun

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