Poulet aux prunes

de Marjane Satrapi et Vincent Paronnaud

France/Belgique, 1h33, 2011.

Mostra de Venise 2011.

Sortie en France le 26 octobre 2011.

avec Mathieu Amalric, Maria de Medeiros, Edouard Baer.

Un peu de mélancolie, une goutte d’orient, une pincée de nostalgie, beaucoup d’humour, un soupçon de tristesse et du talent à  profusion, telle est la recette du nouveau film de Marjane Strapi.

Une recette de cuisine ce Poulet aux prunes ? Non, un conte qui emporte le spectateur dans la Perse mythique du début du 20ème siècle, mêlant astucieusement la fable classique et les contes orientaux. Usant avec impertinence de la grammaire du cinéma, Marjane Satrapi et Vincent Paronnaud laissent de vrais acteurs évoluer dans un magnifique décor peint. Dans le Téhéran des années 1950, Mathieu Amalric et Maria de Medeiros forment un couple mal assorti qui boîte entre cruauté et tendresse sous les yeux grands ouverts de leurs deux enfants.poulet2.jpg

Les deux réalisateurs trouvent le ton juste, entre humour grinçant et mélancolie, et les techniques adéquates, pour faire évoluer leurs personnages dans un monde à  la fois féerique mais terriblement ordinaire. Loin du graphisme de leur premier film Persepolis, ils créent un univers totalement inédit entre la bande dessinée et le cinéma. Le résultat est saisissant, on a vraiment l’impression d’être à  l’intérieur de cette fable, partageant avec les acteurs le poulet aux prunes mitonné avec amour par une ménagère délaissée, pour son artiste de mari qui s’étiole de mélancolie.poulet4.jpg

Marjane Satrapi : « Pour moi ce livre correspond plutôt au portrait de l’artiste, sans parler du fait que ce personnage est un membre de ma famille et que j’aime beaucoup écrire sur les gens dont je connais l’histoire. On fait tout un flan autour de l’Artiste. Mais l’artiste est avant tout un être égocentrique et narcissique qui se voit comme le centre du monde, convaincu non seulement qu’il écrit des choses extraordinaires mais aussi que les gens doivent payer pour les apprécier, et il faut qu’ils l’adorent et l’applaudissent. Nous sommes tous comme ça. De façon générale c’est l’expression même de nos névroses. Si vous êtes content vous n’arriverez pas à  écrire des poèmes magnifiques. Il faut que vous soyez un peu dans un état mélancolique. C’était ce que je voulais montrer de l’artiste. Parce que je connais bien tout ça, je suis moi-même égocentrique et narcissique, ben voilà , c’est comme ça. »poulet5.jpg

Auteure de bandes dessinées reconnue et confirmée, Marjane Satrapi avait décidé de porter à  l’écran sa série Persepolis, avec l’aide de Vincent Paronnaud. Présenté au Festival de Cannes en 2007, ce film d’animation avait été un beau succès mais la réalisatrice reconnaissait que cela avait demandé beaucoup plus de travail qu’elle n’avait imaginé au départ. Cette fois, les réalisateurs ont décidé de changer de technique et de mettre des vrais acteurs dans un décor dessiné. Et ils ont adapté un autre titre de Satrapi, Poulet aux prunes, prix du meilleur album de l’année au festival de la bande dessinée d’Angoulême 2005. Une vraie réussite qui confirme leur talent de réalisateurs.

Magali Van Reeth

Signis

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