La Taupe

de Tomas Alfredson

Royaume-Uni/France/Allemagne, 2011, 2h07

Sélection officielle Venise 2011.

Sortie en France le 8 février 2012.

avec Gary Oldman, Colin Firth, Mark Strong, John Hurt.

Un grand classique des romans d’espionnage, porté à  l’écran dans une ambiance surannée et ample, qui pourra séduire les plus réticents au genre, de part sa forme cinématographique.

On peut classer les cinéphiles en deux catégories : les amateurs de films d’espionnage, capables de suivre les intrigues les plus compliquées et de savoir, en temps réel, « qui travaille pour qui » (le fondement même du roman d’espionnage). Puis les autres, comme moi, qui dans le premier quart d’heure du film ont déjà  perdu pied et ne comprennent ni l’objet de la quête ni « qui travaille pour qui » Ceux là  trouveront de quoi se régaler les yeux dans La Taupe qui déroule 2 heures durant une envoûtante atmosphère. taupe2.jpg

Inspiré du célèbre roman éponyme de John Le Carré, paru en 1974, La Taupe nous plonge dans les années de la Guerre froide en Europe. Une Europe coupée en deux entre l’est et l’ouest, le capitalisme triomphant et la surconsommation à  l’ouest, le communisme austère et les disettes à  l’est. A Londres, les agents secrets roulent en DS et ont la mine défraîchi des quinquagénaires revenus de tout, rien à  voir à  James Bond. A l’est, dans une architecture à  la munificence surannée, on meurt pour des idées.

Le réalisateur Tomas Alferdson a opté pour une opposition entre une caméra fluide et très mobile, et des personnages en apparence figés dans leurs amples pardessus et leur mutisme opaque. Sans doute pour renforcer la capacité des « taupes » à  changer de camp, l’imminence de la fin d’une époque et célébrer la vie politique lorsqu’elle n’était pas encore soumise à  la dictature des banques. Dans des tons sépia, où la fumée des cigarettes, les gros téléphones et les meubles en formica étaient un signe de modernité, les espions semblent n’avoir d’autres missions que de se surveiller mutuellement.taupe4.jpg

Les personnages, interprétés avec une chaleureuse retenue par Gary Oldman, Colin Firth, Mark Strong et John Hurt, savent qu’ils jouent une partie d’échec où la victoire n’est que temporaire. Pudiques, discrets et peu bavards, ils nous touchent par leur soudaine humanité (chagrin d’amour, regrets) ou dans une scène surprenante, comme celle de la fête de Noël où le chant entonné par tous est assez décoiffant !taupe3.jpg

Déroutant et envoûtant, La Taupe est un voyage dans une Europe et un temps qui n’existent plus et qui, sans être trop mélancolique, peut aussi séduire ceux qui n’aiment pas les films d’espionnage !

Magali Van Reeth

Signis

Pour marque-pages : Permaliens.

Les commentaires sont fermés