Chroniques Cinéma -« DHEEPAN »

de Jacques Audiard

avec Antonythasan Jesuthasan

Drame social français (1h54). Palme d’Or à  Cannes 2015.

Chroniques Cinéma de Marie-Noëlle Gougeon

Une Palme d’Or qui n’a pas fait l’unanimité à  Cannes il y a quelques mois.
Un sujet d’actualité évoquant la violence que vivent les réfugiés et leurs difficultés d’intégration ici en France. Jacques Audiard brosse un tableau ambigu qui brouille son message.

Jacques Audiard est un habitué des films à  sensations fortes. Ici, il raconte l’histoire de Deephan, combattant tamoul, obligé de quitter son pays. Pour avoir davantage de chances d’être accepté, il se « compose » une famille en embarquant avec lui Yalini, une jeune femme candidate au départ et Ilayaal, une jeune ado orpheline.
Arrivés en France ce trio fabriqué de toutes pièces reçoit son visa de séjour et Deephan trouve un travail de gardien d’immeubles dans une banlieue reculée et en proie à  de multiples violences.
La jeune ado s’intègrera à  l’école, Yalini deviendra auxiliaire de vie et Deephan tâchera tant bien que mal de faire régner un certain ordre dans les coursives de son immeuble. Si la première partie du film est attachante et dépeint avec bienveillance les difficultés que rencontrent tous les réfugiés confrontés à  une nouvelle langue, de nouvelles coutumes, on bascule soudain dans le dernier tiers du film dans une autre histoire de règlements de comptes entre dealers et voyous.. La cité devient alors un lieu de non-droit où la police apparaît absente malgré les nombreux meurtres. Pas d’échappatoires possibles contre ces jeunes de banlieue remplis de violences.
Dernière séquence du film : Deephan et sa « famille » a pu s’exiler en Angleterre où on retrouve le trio épanoui autour du bébé qu’ont eu les deux jeunes gens. Jacques Audiard semble donner comme morale de la fable : Fuyez la France, le bonheur est de l’autre côté de la Manche ! Illusoire et trompeur.

Deephan a obtenu la Palme d’or à  Cannes cette année, et on reste perplexe devant le choix du jury. A-t-il voulu rattraper les essais malheureux de Jacques Audiard les années précédentes sur la Croisette ? Dans de nombreuses interviews, le réalisateur avoue avoir voulu parler d’une histoire d’amour entre des personnes qui ne s’étaient pas choisi de prime abord. Il réussit à  nous intéresser à  ces relations qui peu à  peu se tissent entre Deephan et sa jeune compatriote, à  peindre leur douce évolution, leurs difficultés à  s’intégrer à  un monde nouveau pour eux.
Mais la peinture qu’il donne de la banlieue, cette violence gratuite et destructrice qu’il montre sans l’expliquer, sans donner des clés ou des espoirs pour en sortir sont autant d’arguments qui pourraient justifier les rejets exprimés par l’extrême droite. On ne joue pas impunément sans se brûler à  ce jeu machiavélique, même si on est un très bon metteur en scène

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