Fix Me

de Raed Andoni

Palestine/Suisse/France, 1h38, 2010.

Sélection Acid, Cannes 2010, Festival de Sundance 2010.

Sortie en France le 17 novembre 2010.

avec Raed Andoni.

Comment vivre dans un état de contrôle permanent ? Avec pour tout horizon, un mur d’enceinte ? Entre migraines et thérapie, un homme s’interroge.

Raed Andoni a mal à  la tête. Il aimerait savoir pourquoi et comment se libérer de ses migraines qui lui gâchent la vie. Le film, entre documentaire et mise en fiction d’une situation vécue, raconte le douloureux cheminement d’un homme avec différents médecins. Ce pourrait être un film très nombriliste mais le protagoniste habite en Palestine et de narcissique, le film prend forcément une dimension politique…

Dans un état qui n’a pas d’existence officielle, ceinturé par un mur, où les habitants sont en théorie prisonniers de leurs voisins, ballotés entre différentes factions politiques, comment vivre un quotidien ordinaire ? Dans cette région, tout va de travers, jusqu’à  la terre qui est en dessous du niveau de la mer Pour se déplacer, pour travailler, pour voyager, il faut sans arrêt passer des contrôles, avec ce que cela comporte de temps perdu et d’humiliation.fixme2.jpg

Raed Andoni : « Je suis né en 1967, l’année où l’occupation a commencé à  l’issue de la guerre des six jours. Ma vie a donc démarré sous l’égide d’un contrôle, celui d’un pouvoir étranger. Elle s’est poursuivie sous les mêmes auspices, y compris en prison, le système carcéral ne visant qu’à  contrôler votre âme ».

Pourtant le réalisateur essaye de ne pas mettre la question politique au centre du débat et de se concentrer sur ce qu’il ressent en tant qu’individu. Certains spectateurs occidentaux seront perturbés par cette approche : on ne voit pas la guerre, on ne sent pas les tensions religieuses, on voit même de belles voitures, des familles aisées et des situations beaucoup trop « ordinaires » pour ceux qui attendent autre chose du cinéma palestinien. A ceux-là , Raed Andoni répond qu’il ne veut pas faire un film « palestinien », ni un film « israélien » et encore moins un film pour Européens, qui serait « un pont entre deux cultures ».

Fix me est le film de sa douleur intime mise en fiction, pour tâcher, en la cernant mieux, d’y remédier : « Si je devais me définir, ce serait en tant qu’être humain, cinéaste né dans un pays spécifique vivant une situation particulière Il est impossible de faire un film sur quelqu’un sans impliquer son environnement. Je crois que c’est avant tout un film très personnel. Or, la Palestine est un élément intrinsèque de ma personnalité ; c’est un état de fait contre lequel je ne peux rien. »fixme3.jpg

On peut lui reprocher cette option très personnelle, trouver un peu long l’exercice mais il est salutaire de voir qu’un artiste peut s’extraire de son milieu pour en tirer un œuvre de fiction, permettant à  tous de réfléchir sur le lien entre le corps et l’âme… De même pour la question religieuse, pourtant si sensible dans cette région. A la façon dont les relations s’organisent parmi les proches du narrateur, on peut avoir quelques pistes mais seule une photo de famille, à  peine entrevue, pourra confirmer qu’il s’agit d’un chrétien palestinien.

Enfin, un mot sur le titre qui vient d’une enseigne d’un garagiste proclamant « We can fix it all » ou, en Français, « On peut tout réparer ». Mais justement, lorsqu’il s’agit de l’âme humaine, peut-on tout réparer ?

Magali Van Reeth

Signis

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